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07/08/2018

Zadie Smith : Swing Time

zadie smithZadie Smith, née en 1975 dans une banlieue du nord-ouest de Londres, est une écrivaine britannique, fille d'un père anglais et d'une mère jamaïcaine qui émigre en Angleterre en 1969. Ses parents divorcent alors qu'elle est encore adolescente et à l'âge de 14 ans, change son prénom de Sadie en Zadie. Elle étudie la littérature anglaise à l'université de Cambridge. Swing Time est son cinquième et tout nouveau roman.

La narratrice (jamais nommée) et Tracey, deux petites filles métisses d’un quartier populaire de Londres se rencontrent lors d’un cours de danse. Devenues copines, elles rêvent de devenir danseuses en regardant des cassettes vidéo de films avec Fred Astaire (Swing Time est l’un d’eux, connu chez nous sous le titre Sur les ailes de la danse, réalisé en 1936 par George Stevens). Tracey, la plus délurée et la plus douée, abandonne l’école pour tenter sa chance dans cette carrière alors que la narratrice, moins téméraire ou plus sage poursuit ses études jusqu’à l’université : leurs chemins divergent et elles se perdent de vue. Devenue l’assistante personnelle d’Aimee, une pop star à la renommée internationale, la narratrice sillonne le monde et participe au projet humanitaire de la vedette de la chanson, la construction d’une école dans un village africain. Après bien des épreuves, la fin du roman réunira les deux femmes… ?

Ayant lu deux romans de l’écrivain, Sourires de loup et Ceux du Nord-Ouest, je m’attendais à y retrouver les mêmes excès, la même exubérance d’écriture, ces traits qui font le charme (ou pas, c’est selon les goûts) de Zadie Smith. Or ici, tout est beaucoup plus calme, plus simple à lire. Certes, il s’y passe mille choses, les sujets évoqués sont multiples comme d’habitude mais l’écriture est plus assagie. Pour être franc, c’est ce qui m’a un peu déçu dans ce livre ; c’est un beau roman, c’est une belle histoire, mais… Que le roman offre matière à discussions et belles interviews dans les médias, c’est certain car il y a de quoi faire, mais dire que je me suis régalé à le lire serait exagéré.

Parmi les thèmes abordés par Zadie Smith : la vie aux côtés d’une pop star, l’implication de ce genre d’artiste dans des œuvres humanitaires en Afrique avec le décalage inhérent à ces deux mondes diamétralement opposés et la portée finale de l’action « Que se passera-t-il quand nous partirons, quand la nouvelle école sera construite et fonctionnera et que nous ne viendrons quasiment plus ici, ou plus du tout ? ». L’Afrique et les milles problèmes qu’elle recèle, excision, montée de l’islam, adoption des enfants par les occidentaux, économie locale… L’écrivain pointe aussi du doigt – ironiquement pourrait-on dire – les nuances de couleur de peau qui vous font Noir ici mais pas là-bas ou de la relativité des choses.

Et en fil rouge, l’évolution des vies des deux femmes, leur amitié enfantine puis leur séparation : Tracey qui semblait bien partie pour réussir dans la danse virera chargée de gosses et l’esprit dérangé, quant à la narratrice sa vie pourrait sembler excitante aux côtés d’une vedette mais elle n’est qu’un pion qui bosse sans compter et qui peut être renvoyé sans préavis et pour ce qui est de sa vie personnelle/affective…

Le roman est construit sur des oppositions : les familles des deux jeunes femmes sont métissées mais pour l’une, père Blanc et mère de couleur, pour l’autre l’inverse ;  leurs caractères sont opposés ; la vie en Afrique ou à Londres, New York etc. ne peut se comparer ; la mère jamaïcaine de la narratrice œuvre pour les déshérités de Londres tandis que la pop star Blanche tente d’aider les jeunes Africains chez eux, etc.

Si à la fin du roman, la narratrice retrouve Tracey, cette note d’optimisme reste néanmoins mesurée et sans garantie de futur.

 

 

« Mais, personnellement, je pensai qu’Aimee n’avait pas tort : je me souvenais de mes propres camarades de classe, de mes cours de danse, des aires de jeux, des groupes d’activités au centre de jeunesse, des anniversaires, des enterrements de vie de jeune fille, je me souvenais qu’il y avait toujours une fille avec un secret, quelque chose de furtif et de brisé en elle, et en marchant dans le village avec Aimee, en entrant chez les gens pour leur serrer la main, accepter la nourriture et les boissons qu’ils nous offraient, se laisser embrasser par leurs enfants, je pensais souvent à cette fille, cette fille qui vit partout dans le monde et depuis la nuit des temps, qui balaie la cour et sert le thé ou porte sur sa hanche le bébé de quelqu’un d’autre, cette fille qui vous regarde avec un secret au fond d’elle dont elle ne peut pas parler. »

 

 

zadie smithZadie Smith   Swing Time   Gallimard – 469 pages – (A paraître le 16 août)

Traduit de l’anglais par Emmanuelle et Philippe Aronson

 

06:48 Publié dans Etrangers | Tags : zadie smith | Lien permanent | Commentaires (2) |  Facebook |